jeudi 24 mai 2012

Je ne sais pas 28


28

Une paire de ciseaux coupant la cellophane, des gouttes de sang, une ville magnifique dans le petit matin silencieux et brumeux, des œuvres d’art anonymes sans la lumière du jour, le bruit des talons, un rythme, une silhouette, un pont, un homme traversant, la nostalgie d’un endroit connu et quitté, un retour avec l’impression de ne pas être parti, une nostalgie inutile dans l’aiguisement des sensations, un rejet, les eaux du fleuve, des gouttes de larmes, un débordement intime, entre le sourire d’être vivant et la volonté d’être mort, le courage manque dans la sobriété rigoureuse, une ligne, un trait, des éraflures peut-être, un corps dans la limite de l’enveloppe, une image, ils se résument à peu de choses le temps, celui qui passe sans le mesurer, celui qui passe dans les paroles anodines, les paroles, ce qu’il y a au fond des nuits, l’insomnie sensitive, un  ressenti permanent, vibratile, attentif, les passages cloutés des grands boulevards, la vitesse, les rires, au milieu des autres malgré moi, une douleur nécessaire peut-être, une douleur dans la négligence de ce que nous sommes, se dire jusqu’au bout, se dire loin du récit, dans le rapprochement des peaux, dans l’odeur des aisselles, ce qui nous dégoûte nous rapproche de nous, le vinaigre. Il y en a qui partent et d’autres qui restent, dans la temporisation, il y en a qui veulent s’enfuir et d’autres qui veulent revenir, un balancier, le va et vient, il y en a que l’on aime et d’autres que l’on aime plus, pour toujours ou par caprices, il y a des paroles en l’air et des frappes aériennes, des avions qui emmènent et qui débarquent, il y a des petits bateaux, la coquille qui protège le fruit, les membres que l’on brise dans la soudure métallique d’un chantier naval, les vagues sur la coque, des croisières, le détestement du mot rêve, une moisissure sur la réalité de la débauche comme autant de paroles inutiles sur l’inconnue des jours qui suivent, les jours qui suivent, en être sans en faire partie, la culpabilité qui en découle, coupable de ne pas comprendre les enjeux, nu, ni mieux ni moins bien, nu dans la tentative de ne pas céder à la colère, se retenir pendant que les portes et les volets claquent aux vents que les hommes affrontent sans mesurer l’impact, l’enjeu, prêts à tout pour la condition d’un seul au détriment de combien d’autres, les autres, le cercle, loin de l’intime et son désordre. Un fil discontinu, une coulée dessinant un trait rouge sur un visage, la beauté de la blessure, l’œil rougi de la douleur, les frontières se dessinent dans la négation de la souffrance de l’individu, dans la torsion, la vrille. Il y a des regards insoutenables. Les enjeux. Il y a de la violence qui ne se marque pas sur les corps, des êtres abasourdis, dans la lobotomie hiérarchique, des immeubles à étages, des tours extravagantes, extravagantes, extravagantes et fixes au milieu des êtres qui marchent à leur pied dans le vertige des sommets inaccessibles, dans l’étrangeté quotidienne d’un soleil qui continue à nous éclairer, dans les parcs ombragés où les bacs à sable et les plaines de jeux résonnent de cris de joie, il y a des hommes qui pleurent les femmes qui bercent les enfants pour qu’ils s’endorment enfin, il y a ceux pour qui tout va bien et c’est tant mieux, heureusement qu’ils sont là, ceux-là, au milieu des oiseaux, loin des obstacles et dans l’émerveillement de ce qu’il y a, rien de plus. Et il y a moi, quel est mon enjeu à vous regarder si fort, peut-être trouver une réponse à ma dysfonction, plus égoïste encore, non, coupable de prendre et dans la tentative de rendre tant bien que mal dans ma réalité tronquée de la vôtre, insuffisant d’envergure peut-être pour ambitionner autre chose qu’ajouter du temps à du temps, l’enjeu où se trouve-t-il. Dans l’excuse du regard que je porte, l’écriture comme un filtre d’amour au milieu des colères, la seule manière de vous dire absolument sans que l’image implique quoi que ce soit, je ne suis personne excepté celui qui tente de vous dire, un personnage pour certains, une personne pour d’autres, est-il possible de faire la part des enjeux dans l’inconscience de qui nous sommes réellement. La beauté n’apparaît qu’au milieu de la laideur, dans le commun du quotidien, il suffit de la prendre, elle s’approprie sans difficultés puisque ce que vous regardez reste inconscient de sa beauté, dès qu’il y a conscience, elle disparaît dans le passé ou le futur mais elle n’est plus présente, l’évanouissement, l’évaluation personnelle de la quantité d’espoir qu’il me reste par l’émerveillement du temps qui se suspend, sa fréquence et son absence de valeur, le voilà l’enjeu, l’émerveillement sans la valeur de ce que je regarde, dans la fidélité du chien à son maître, je serai toujours derrière la porte, toujours.

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