lundi 31 décembre 2012

Le résultat

Une trace de doigts sur la vitre propre tout autour, dans la main un couteau aiguisé, des fruits, des photos mais pas d'avion, il fait trop chaud pour la saison, c'est étrange, tu ne devais pas venir et pourtant j'entends le bruit de tes pas qui m'empêche de lire, je ne te vois pas malgré la transparence de la vitre tachée, longtemps qu'il n'y a plus eu ici la lumière d'un soleil, aveuglé, la beauté n'existe pas s'il n'y a pas la laideur, c'est étrange les rapports que nous entretenons, et ceux que nous n'entretenons pas, je n'ai pas entendu ta question et pourtant je réponds à quelque chose, égocentrique, une toupie, vacillante par manque d'élan dans une côte trop forte, tu comprends, il faut essayer quoiqu'il en soit il faut essayer, le résultat, quoi, le résultat.

jeudi 27 décembre 2012

mercredi 26 décembre 2012

Traversé, dans le mélange, par le mélange de ce que nous sommes ensembles et ce que je suis seul, un dérangement, une absence, le vent, je ne suis pas venu pour te demander et encore moins pour pleurer, pour voir et entendre c'est pour ça que je suis venu, malgré les manques et les colères, malgré la vie et la guerre, malgré l'amour et la chaleur, j'attends l'été pour enfin trouver une bonne raison de m'en aller, dans la lumière aveuglante des jours où l'on s'embrasse insouciants de ce qui précède et des cris des enfants, je voulais partir mais je suis resté et c'est difficile de n'en vouloir à personne quand on a pas le courage de s'en vouloir à soi-même dans les caresses adoucissantes des jours avant de se jeter contre le mur rugueux des paradoxes, il y a la mort, il y a la mort.

vendredi 21 décembre 2012

La vie

La vie dans le fond des yeux d'un oiseau, la vie au bord, dans un gémissement, entre les cuisses, la vie, sur le toit d'une usine sans ouvrier, la vie que je crie face aux murs que je tente de détruire, la vie dans la main qui saigne de la douleur, la vie comme du sable dans la bouche, aiguise-moi pour que je tranche enfin dans la vie, crache le sang aux coins d'une rue, des culs précédés par le bruit des talons, la vie des femmes différentes apparemment de celle des hommes, la vie sépare, un échangeur assourdi des klaxons des voitures, je te mettrais bien un poing dans la gueule mais je n'en ai jamais trouvé le courage, la vie dans la peur des conséquences, immobile et mortel, la vie que je ne rêvais pas, la vie parce qu'il faut bien, des injures par les fenêtres, la vie des pigeons qui ne connaissent pas la migration, le claquement des corps qui tentent de la sentir, la vie, tu te racontes, tu te racontes pendant que les autres dorment, les travers, des voitures accidentées, des amours violentés, des figures défigurées de ce qu'elles ont à cacher, la vie comme une gifle les yeux ouverts, sur un quai de gare quand on promet de ne jamais revenir, la vie alors que l'on ne veut pas partir, un bassinet d'eau froide dans lequel le chien vient boire, de l'inox, la vie froide d'un glaçon dans de le liquide bouillant, tu claques des dents, la vie je ne peux rien faire de plus, la vie.

mercredi 19 décembre 2012

Cherche toujours...


La peur de lâcher confrontée à la volonté de trouver, un effacement, une continuité peut-être, les jours se suivent.

mardi 4 décembre 2012

lundi 3 décembre 2012

La question

Qu'avais-tu à demander, je n'ai pas entendu ta question, un moment de distraction peut-être, une indisponibilité, je n'entends plus ta voix mais une succession de sons issue de ta bouche qui articule, un grondement, inaudible dans le vacarme du bruit sourd de la peur qui accompagne le quotidien, je ne peux pas perdre le peu qu'il me reste, je ne t'entends pas parce que je mets tant d'énergie à ne pas glisser, tant d'énergie dans ce coups par coups, comme si nous nous baisions au jour le jour sans se souvenir des corps mélangés sur la scène, sans voir le sang qui gicle, des bites et des chattes au grand jour dans la purulence des champs de bataille, je ne t'entends pas, pourquoi tu te tais, tu n'aimes pas ces mots que j'utilise, mais ils résonnent tellement que je n'entends pas ta question, dans le rouleau du bout il y a des images assourdissantes, des cris de poésie, des bouches ouvertes, des poissons qui n'ont plus le courage de remonter le courant, je n'entends plus, l'éloignement, la dérive de l'énergie nécessaire à continuer ce que je n'avais pas encore fini, prendre soin de moi pour enfin prendre soin de toi, ils marchent dans les rues brandissant des panneaux gravés de slogan, il n'y a plus de révoltes parce que trop d'usures, je n'entends pas ta question parce que je cherche à sauver ma peau, je ne cherche pas à comprendre, je ne veux pas comprendre, je ne veux plus comprendre ta douleur, la mienne est trop forte pour arriver à considérer la tienne, et puis surtout c'est la mienne, elle m'appartient, mon étendard, le moteur de la colère excusable grâce à toute cette souffrance, bafoué sans inscrire, plus de tentatives, des constats stériles pour construire ma forteresse, mon lopin que j'encercle, ma propriété, il ne nous restera bientôt que cette colère pour continuer sur une ligne d'horizon chaotique au milieu des bombardements, je n'entends pas ta question mais je te demande de ne pas m'en vouloir de voir l'autre comme mon ennemi, la fracture de la haine, la délation refait surface, dénoncer pour ne pas être dénoncé, juger pour ne pas être jugé, pleurer de ces yeux aveugles à toutes ces images, à l'urgence de toute cette chair éparpillée, les êtres sont devenus une écharde dans le doigt du monde infecté par le profit, la douleur se répand comme une traînée de poudre, l'opulence et la prétention, objectif, à court terme, la vie se meurt dans la sauvegarde économique des valeurs futiles, nous avons perdu de vue l'indispensable, le liant, l'humanité nécessaire, je suis coupable comme tant d'autres de ne pas entendre ta question.
Les distances s'élargissent et je ne veux rien retenir. Aujourd'hui même la vie est bien trop longue, à la vitesse où vont les choses nous nous lassons de tout, tout change sans cesse pour éloigner l'ennui, je ne veux rien retenir, accepter l'ennui afin de ne pas brouiller ma piste et ne plus empiéter sur celle des autres, tracer cette ligne d'un trait du temps qu'il reste et ne rien retenir. Vivre et voir vivre.

dimanche 2 décembre 2012

Les portes se sont ouvertes sur une part méconnue et intime, impensable, inconnue de lui-même, il se méconnaissait, il a cru devoir crier et accepte aujourd'hui l'idée de chuchoter, juste, quand il dit juste, c'est chuchoter juste et intimement en cherchant à se trouver, et, non plus à démontrer qu'il sait, la porte s'ouvre sur l'acceptation de l'irréalité pour les autres et pour lui-même de son réel et son affirmation. Voilà donc qu'enfin il ouvre la main pour caresser et accepte d'abandonner son corps au réconfort de la contemplation des failles et des crevasses que toute cette affirmation, presque cet endoctrinement de lui-même par lui-même, une maîtrise violente, de son réel protégeait de la part faible par peur des coups, car il a peur, il a toujours eu peur et aura toujours peur, plus des mêmes choses, mais d'autres viendront toujours le pousser à vouloir maîtriser et il devra s'en défendre. En ouvrant cette porte il a accepté que son chemin soit une succession de tentatives pour enfin ne pas être pour les autres, mais pour lui-même, pour enfin rencontrer les autres. C'est dans cette complexité qu'il va tenter de ne plus rien tenir, de ne plus maîtriser mais d'accepter la patience nécessaire au progrès. La porte, celle qu'il regardait depuis si longtemps comme une frontière, un impossible, s'est ouverte et il est entré ou plutôt  sorti de la colère qui le poussait pour commencer à aimer.

mardi 20 novembre 2012

Etre venu, là, repartir, tu n'y étais pas, ou peut-être nous y étions, dans l'haleine soufflée je n'ai pas reconnu ton odeur, des sangliers fumant sur le bord des routes, une voix qui chante, des filets pas assez solide pour retenir, là, une ombre, un souvenir voilé, le manque parce que j'attendais que tu sois là, peut-être tu y étais mais ailleurs, là c'est où, peut-être juste à côté, une pointe, sèche comme ma bouche parce que j'ai peur, une nuit d'hiver, froide, le givre, les branches nues fragilisées et la course dans la forêt, pieds nus et blessés par le silex taillant, nous nous sommes ratés, mais t'avais-je bien regardé, je n'ai pas senti ton odeur, je ne reviendrai plus parce que je n'aime pas l'effort, le temps me manque, pas de retard inexpliqué.

jeudi 15 novembre 2012

Debout

Dans un moment de contentement inhabituel, surpris par son corps et sa faculté de se mouvoir il souriait, étonné comme une enfant de ses premiers pas, lui, l'adulte, il s'était dressé au milieu des autres pour enfin crier son bonheur et sa joie de vivre, il devenait musique dans le bruit.

vendredi 9 novembre 2012

Dans un élan

Parce qu'il y a toujours cet élan, cette course qui le conduit à la folie, à se projeter contre un mur comme l'oiseau sur la vitre, dans une forme de désespoir face à l'inhumanité, son besoin de reconnaissance, il y a cet élan qu'il prend sans jamais décoller, des coups par coups qu'il confronte à sa certitude de savoir voler, sur le bord de la falaise les jambes dans le vide il a peur sans pouvoir le dire. Les mots parfois ne suffisent pas ou plus, dans la poétique des images s'engouffre la solitude de chacun, les aveugles ne veulent plus voir par peur du bruit, quant aux sourds effrayés par les images ils deviennent muets, nous perdons les sens, pour être certain d'être vivant nous nous projetons contre les murs dans la douleur des saignements sourds, mais il y a toujours ces êtres qui bouches ouvertes et des larmes plein les yeux s'élancent, s'élancent, s'élancent, s'élancent...

lundi 5 novembre 2012

Des Photos de l'exposition...

Des photographies de Olivier Calicis à voir là :
http://www.flickr.com/photos/thierryrobrechts/sets/72157631932940550/
A bientôt...

mardi 30 octobre 2012

Merci

Il y a aujourd'hui tant de personnes auxquelles je pense, on dirait que les échéances personnelles sont là pour nous rappeler l'imbrication de nos vies, tout construit, même ce qui sur le moment nous semble insurmontable. Je promène comme ça avec moi un nombre de personnes incroyables auxquelles je pense régulièrement mais qui lors de ces jours particuliers où la vie nous met en scène reviennent toutes ensemble à la fenêtre de ma mémoire. Il y a eu des échecs, des réussites, des départs, je suis inévitablement la somme de toutes ces rencontres, je pense à eux, au chemin parcouru, à ceux qui aujourd'hui seront là et à ceux qui n'y seront pas. La vie et ses traversements construisent les êtres que nous devenons bien souvent à notre insu. Merci.

mercredi 29 août 2012

Il

Là, comme s'il n 'y avait pas d'ailleurs. Un frottement, comme s'il n'y avait pas d'usures. Le tissu craque à la couture, tendu par le corps qu'il contient, les cuisses fatiguées de la marche quotidienne vers là et pas ailleurs, il ne peut pas y avoir un ailleurs, trop de peur. Dans la restriction quotidienne du périmètre des possibles, un cercle, des clôtures, un fil délimitant une pâture, là. La pierre est froide, on entend le cri des enfants dans l'apprentissage, l'autre dans l'humiliation de soi, l'autre une création de nous pour défendre celui-là, échouer, échoué, un homme est étendu dans les débris, là comme s'il n'y avait pas d'ailleurs, dans la poésie d'un jour qui se lève. Un jour.

jeudi 5 juillet 2012

Je t'aime malgré toutes tes imperfections et ta haine, il répétait ça comme s'il se parlait à lui-même.

jeudi 21 juin 2012

Dans le mouvement des corps la fluidité d'un geste, la bouche d'un homme. Je me suis arrêté pour voir tout ça, la danse, la danse, les hommes parlent seul. Des petits poix blancs sur un fond noir. Un fond noir. Dans la clarté du jour un acouphène, pourquoi tu pleures. Un sourire. Des personnes se rassemblent, ils marchent maintenant, ils marchent.

Au début était le verbe

http://www.youtube.com/watch?v=qOlVAr8CFFM&feature=youtu.be

lundi 18 juin 2012

La ligne

Une ligne sur le sol, une indication, j'arrache une page d'un livre, debout je lis à voix haute son contenu, il y a longtemps que je voulais le faire, les véhicules frôlent mon bassin me faisant vaciller mais je ne me dérobe pas, fixé sur l'intensité des mots que je crie, ils passent pendant que je reste, ils passent pendant que je reste,  ils passent pendant que je reste. Inutile, je sais, pour vous peut-être, mais vital pour moi, alors je reste, alors je reste, alors je reste.  

lundi 4 juin 2012

Je ne sais pas FIN

42

Est-ce qu’il faut se taire et ne pas dire.

Je ne sais pas 41

41

Si loin dans l’enfermement de la pièce, si loin de vous, refuser le risque de se confronter, être seul et vouloir le rester, certain de ce que nous sommes, sans mesurer ce qui nous sépare de la normalité, la folie de la pièce au milieu des murs salis par le sang des percussions, ne plus vouloir aller plus loin le jour, se terrer, dans le refus du contact, du doute, ne plus vouloir justifier là où nous en sommes, se réfugier, un réfugié de sa propre initiative, mesurant la différence, la folie, la folie, l’obsession de la peur des blessures, provoquer la douleur physique pour oublier la mentale, l’incompréhensible, cette distance qui s’installe à l’insu de toutes les parties, dans la dérive des corps sous les pressions, le cloisonnement, s’extirper, voir enfin les ressemblances, la porte, la porte.

Je ne sais pas 40

40

Une place, des bancs, s’asseoir, se poser, regarder, une place, celle-là et pas une autre, une place, celle-là, ouvrir les rideaux, le jour, un autre, pas le même et pourtant si proche encore, rester, la force nécessaire, bien plus simple partir, loin, toujours plus loin, le reflet dans la vitre, les vitres brisées dans le souffle des déflagrations, l’acouphène, le sifflement, l’alarme, où êtes-vous, dans le cri vers l’extérieur que personne n’entend, dans l’urgence, dans le ressassement des mêmes jours, dans la succession inévitable vers la fin, dans la tristesse de ne pas savoir, y être, chaque matin attendre, attendre l’action qui justifie la présence, à l’extérieur, les questions inutiles, à l’intérieur, la peur, dans le tremblement du temps, dans les passants à travers la fenêtre, dans ce que l’on barre comme si cela n’existait pas, dans ces êtres que l’on oublie, je n’ai jamais pu oublier, jamais, ils sont tous là, à côté, en face surtout, plus en face. Oublier. La somme, l’addition des paroles comme autant de plaintes inutiles dans le bruit du monde, s’arrêter pour dire enfin, se taire dans le pas de recul avant la battue, plonger à corps perdus après la retenue nécessaire, la pudeur du silence, le geste du corps, le corps enfin, le corps, dans le morcellement, les étapes successives, l’inachèvement, une ligne.

dimanche 3 juin 2012

Je ne sais pas 39


39

Les hommes chantent dans l’incendie. Il ne faut pas mentir aux enfants. Les chambres d’hôtels sont vides dans les villes abandonnées. Les barmans sont ivres de la beauté des femmes dans l’irréalité des promesses de lendemains. Le monde s’accroche à ce qu’il trouve pendant que les poissons dorment le ventre à l’air. Nous sommes tellement nombreux. Enfermés, enfermés, le préjudice de l’éducation, les limites de notre vision, le champ, dans la balance des couleurs, dans la saturation, les hommes chantent dans les incendies, dans le vent des révoltes, ils s’attisent, des brindilles de bois sec. Les océans noirs de ce qui fait avancer les bateaux, les yeux fermés dans l’engluement des vagues, il n’y a personne et pourtant nous sommes si nombreux, nombreux, il y a eux, il y a nous, une frontière déjà, des lignes tracées par des fils barbelés, la libre circulation. Il y a les femmes qui sentent bons et qui nous rappellent comme elles sont belles dans la nudité d’une feuille craquant sous les doigts malhabiles d’un enfant, il y a vous, il y a toutes celles qui font que nous sommes aujourd’hui, aujourd’hui, demain, nous ne savons plus, hier peut-être, irréel, dans la virtualité des mots échangés. Les numéros des chambres d’hôtels ont disparu, les palaces flottent dans l’odeur des parfums, la brume a l’odeur du souffre, les matins se lèvent encore sans vraiment savoir pourquoi et nous les suivons de manière inlassable et mécanique, mécanique dans le vrombissement des voitures, dans l’explosion des moteurs. Tu souris, tu souris, de ce côté-ci de la vitre tu souris, dans les paysages idylliques, la beauté de la neige à côté de la chaleur du poêle. L’émerveillement de ne pas se connaître, se voir sans se connaître, derrière la vitre, ne pas s’alourdir de la charge, profiter de la beauté, se dire que l’amour existe, possible, dans l’engagement. La chair, son odeur, je veux sentir l’odeur des chairs, des lambeaux d’êtres humains, les femmes dans la nudité d’un corps, se blottir sans plus bouger, respirer, dans la chaleur des plis, sans parler, sans parler, sans parler, sans parler. Dans le bercement de la lumière, dans ces instants ancrés, les enfants se tiennent par la main, les femmes les arborent comme des étendards dans toute l’injustice des limites infligées, une nuque dégagée laissant transparaître toute la fragilité, inconnue, inconnue. La ville est belle le matin, à l’aube je traverse la porte vers la rue, dans l’invitation du lever, un banc, un pont, le pont, le pont, nous sommes nombreux et pourtant seuls parfois, seuls parfois, dans l’appartenance mais seul, la mémoire des autres, ceux-là, les blessures, le nid des oiseaux. La sonnerie de téléphone, nous ne sommes pas là, pas envie, pas le temps, le temps de regarder passer les bateaux sur le fleuve en dessous du pont, les bateaux aux portes des écluses, nous ne nous sommes pas dits au revoir, nous ne nous étions pas dits bonjour non plus, votre image sur le pont reliant les deux berges disparue dans la rainure des lattes, flottant sur le cours d’eau avant de couler dans la mémoire, la mémoire imparfaite magnifiant ces instants réels, la fiction d’un partage sans l’échange des odeurs, le fantasme, et si rien n’existait excepté ce que nous inventons, les liens se délient, la grande échappée.

Je ne sais pas 38

38

Je vous attendais.

samedi 2 juin 2012

Je ne sais pas 37

37

Une voix, dans la lumière matinale, l’évocation d’une ville, d’un début après une fin, le travail au quotidien dans la pugnacité, la nostalgie des souvenirs, on écrit pas sur le bonheur, dans l’insouciance, on n’écrit pas, l’évocation d’un visage, trop tard pour le rencontrer, trop tard, l’attachement à la rigueur, une rencontre malgré l’absence, l’impression de suivre, l’impression de connaître malgré l’absence, de lieux en lieux, le temps qui nous sépare, une autre époque, c’est dommage que vous ne l’ayez pas connu, même une fois, l’inconnu qui vous manque, les vagues entrent par les portes ouvertes, elle submerge les êtres de sa générosité la mer, c’est ce qui coule sur les pages, l’écume, l’encre, il reste ce qu’elle n’a pas pu emporter, il reste toujours.

Je ne sais pas 36

36

Dans la course pour éviter le cloisonnement d’où l’on vient, comme un traître vouloir un ailleurs, refuser l’emprise du cercle, tout ceci se termine, une volonté individuelle de vivre malgré l’amour inévitable, asphyxiant pour certains, nécessaire pour d’autres, l’amour n’existe peut-être pas, et si ce n’était qu’une lutte, le pouvoir, et si l’amour n’existait pas, dans l’explosion du bloc de granit, dans l’éparpillement des raisons, dans la variation des valeurs, dans ce que nous refusons par principe, la reproduction des gestes familiers, les habitudes, la révolution d’un seul contre tous, face à la répression aveugle, pas une évasion, un envol, la générosité jusqu’à l’acceptation du détestement, ne plus vouloir être aimé pour être simplement, dans l’éloignement nécessaire aux larmes de douleurs que la singularité inflige, le bri des chaînes, l’enfant, l’enfant, l’enfant dans la nudité de nos déversements, le chemin, depuis tout ce temps, tout ce temps sans trouver, rien, et continuer pourtant, malgré les jours froids à travers les vitres, le gel, le reflet du soleil sur le fleuve ondulant, une coulée d’argent dans la vallée sinueuse, le remous des barrages, les lignes, les croisements inévitables, le temps où il est trop tard, les hommes s’affûtent, dans l’embellissement des femmes il y a toute la douleur qu’ils aimeraient soigner, nous ne pouvons rien faire les uns pour les autres excepté espérer que chacun se libère de ce qui l’enfreint, les heures sont longues dans le doute quotidien, dans cette solitude comme une figure imposée, acrobate du temps, de la rigueur minimum, dans l’envie des uns et le besoin des autres, dans le dégoût de certains jours, pleurer, tomber le masque, vainqueur d’une minute, affrontant la suivante, dans le chaos du présent hors de la séduction, avouant toute la faiblesse de l’attachement malgré cette volonté d’autonomie, nous sommes inévitablement référents, inévitablement et malgré tous les efforts pour prouver le contraire, incapable de se délier, de ne pas revenir, traître et coupable dans la solitude, hors du réconfort des bras tendus pour nous bercer, dans la solitude des pères abandonnés, compromis.

jeudi 31 mai 2012

Je ne sais pas 35

35

Un homme nu sur le bord d’une falaise, seul, affrontant le vent comme un oiseau, les pieds dans un mélange de terre et de sable, dans la chute du jour, la musique est forte, aussi forte que la volonté de voyage, dans la récurrence des vagues, les vagues, les enfants sont en vacances, le corps dans la rythmique, il danse, le sourire, la conscience du volume dans la résistance, dans les odeurs enrobantes, il danse, la peau se couvrant d’un voile de sel, l’amour, l’amour, l’amour dans le manque, dans la déstructure, dans l’envie de se voir, dans la vérité de ce qui nous dégoûte l’un de l’autre, l’un de l’autre, les bras ouverts prêts à accueillir, accueillir dans la naïveté des enfants, dans le présent loin des projections, la solitude nécessaire, nécessaire, les amants pour la vie peut-être, peut-être, ne rien certifier et rester sur le bord de la falaise dans la beauté des éléments. Une chaise sur le quai d’une gare, une chaise c’est fait pour s’asseoir et regarder passer les trains de marchandises, ceux qui ne s’arrêtent pas, une chaise avec un sac à côté, des tartines et un thermos, du café fort pour ne pas en rater un, ne pas fermer l’œil, le sourire des passagers qui font signe, faire un signe à celui-là qui attend, le train, le bon, celui qui l’emmènera ou qui le ramènera, toujours on revient, toujours le long des fleuves, on revient. Qu’importe ce que l’on pense, il reste ce qui est, là devant nous et que nous ne pouvons nier, l’évidence de la vie, telle qu’elle est, dans l’urgence des interventions, dans les sirènes, à nous de voir, d’entendre, de sentir, il n’y a pas de réponses, il faut regarder, regarder, le recul nécessaire pour voir le soin des larmes nécessaires, la conscience de la mort pour enfin voir la vie, au bord de la falaise, dans le vacillement, la flamme chancelante d’une vie, dans la nudité d’un corps malmené, loin de celui dont nous rêvions, dans ce qui nous sépare de l’image de la perfection, dans le départ de ce qui ne devait pas rester, les scories, ne rien tenir, laisser aller, ne pas s’interdire, se permettre de dire, être des enfants, vouloir le bien de l’autre dans la violence de notre vérité, prendre position, ne pas faire semblant que rien n’existe, considérer notre présence. Accepter la poésie quotidienne de ce qui nous est donné à voir dans l’engrangement des images belles de ne pas savoir qu’elles le sont, la beauté intime d’un moment que nous sommes seul à voir, les yeux ouverts, les yeux ouverts dans le vertige de la falaise quand une femme a le visage fermé de colère, la lumière, autre chose, la lumière dans les paroles inutiles, il n’y a rien à ajouter, rien, l’abstraction. Les miettes sur la table, la marque d’un passage, les miettes des regards, les miettes, se contenter, non, ne plus se contenter, avant les miettes quelque chose, un instant, le temps de se regarder, de se dire hors du contentement, de se voir avant le départ, peut-être tout à l’heure ou bien plus tard, avant nous voir, nous regarder dans l’entièreté, dans les plis, hors de l’ennui et avant le temps nécessaire à se retrouver, l’odeur, olfactif, sentir le corps dans l’intimité, cloaque, assoiffés de sels, le ventre tordant le corps, les larmes jaillissent le manque, la mort presque, à quoi ça tient la vie, l’espace d’expression de la matière, le chancre, les êtres se consument, il n’y a pas de paroles, des gémissements au mieux, dans les rigidités de la calcination, dans les cris de l’endormissement, le silence, l’effacement de l’un ou de l’autre, vivre dans l’évanouissement de ce que nous croyions être, il ne reste rien, le primaire, l’odorant, les animaux se lèchent, se lèchent. Les hommes nus aux bords des falaises dans la douceur des peaux réchauffées au soleil des jours d’abondance, dans le serrement des liens, dans la jouissance, combien jouissent encore, combien se lèchent encore dans l’odorante présence, dans le désir de ce qui dégoûte, aimer ce que nous sommes.

mercredi 30 mai 2012

Je ne sais pas 34

34

Emu jusqu’à la gorge, le serrement pour retenir, un homme passe, toujours le même, le même. Au-delà du visage il y a le visage percuté par la lumière, rendant les zones d’ombres, les orbites dans la sculpture de l’arcade, la naissance du nez, la bouche, la commissure, tout ce que l’on ne voit pas et qui crie, il y a des femmes, toujours différentes, le vent assèche la peau, des gerçures dans l’absence des bouches, quand il s’engouffre, le vertige. Il y a des tas de pierre, des bras plus longs que la normale, la charge, la brisure d’une réponse attendue, ne rien voir venir, venir, il y a ce que l’on regarde et les yeux qui le regardent, il y a des hommes que l’on reconnaît et qui font semblants de ne pas voir, mais on les aime quand même, c’est difficile de voir quand on ne veut pas voir, parfois il y a des surprises, une surprise suffit, l’homme repasse, lui aussi il attend, dans l’inquiétude comme si quelque chose se jouait, dans la course des enfants les pieds claquent. Une paire de ciseaux, la coupure signifiant la distance, nécessaire ou subie, une femme à nouveau, derrière les enfants il y a toujours une femme, les enfants regardent ce que les adultes ne voient plus, les adultes regardent ce que les enfants ne voient pas encore, encore, rien n’est certain dans la balance. Dans les barrières enfermées, certains font signes, c’est beau d’être un enfant.

mardi 29 mai 2012

Je ne sais pas 33

33

Dans la nécessité, ne pouvant faire autrement, dans la nécessité venir ou aller, absolument et pas autrement, si tu viens, viens absolument ou ne viens pas, ne viens pas, rester seul c’est mieux, nous nous décevrons de toutes les façons car nous attendrons, n’y allons pas, restons là où nous en sommes sans croire que nous pourrions rencontrer l’inconnu, s’enfermer afin d’éviter les déceptions, les infortunes, rien à prendre, il n’y a rien à prendre, ne viens pas, il faudra se déchaîner, nous n’aurons pas le temps et encore moins l’énergie de tomber les masques, ne viens pas, il faudra se déshabiller et il fait froid, c’est l’hiver par ici, l’hiver, l’hiver, dans la générosité nous ferions semblants d’avoir chauds, semblants, dans l’insupportable mascarade, nous resterons dans les camisoles, cries, hurle ta libération, seuls, ne nous chargeons pas des déguisements, nous punaisons des dessins d’enfants sur les murs de l’isolement dans les prisons de velours, dans l’onctuosité d’une porte fermée, seuls malgré la présence, ne viens pas, le souvenir de ton odeur, l’odeur, la somme de ce qui se cache dans les plis, la dissimulation, sentir pour voir, dans l’urgence de répondre à la priorité, animal dans le sang chaud des canines, l’enfant cherchant le sein, la privation nécessaire, l’arrachement, libérateur, seuls, seul, accroupi dans le vomissement, ne viens pas.

lundi 28 mai 2012

Je ne sais pas 3

32

Attendre que quelque chose se passe, ne pas partir, attendre, accepter la tâche, dans la colère de ne pas y arriver, en vouloir même aux lumières des fenêtres, il faut que tout aille fort, vite, il faut quelque chose dans cette attente insupportable, rien ne peut venir du dehors, chanter la bouche ouverte, le dedans, le dedans, dans la nécessité, l’urgence, prendre ce temps dans l’urgence, le temps nécessaire à l’éclosion, ne rien galvauder dans la vulgarité, embellir dans la solitude, un trait rouge, des visages illusoires dans le sourire des vitrines abandonnées, une image arrêtée, entre ombre et lumière, le portrait proche et loin à la fois, tellement loin, se perdre, se perdre et décevoir, se tenir là malgré, incomplets.

dimanche 27 mai 2012

Je ne sais pas 31

31

La solitude, la solitude suffisante et nécessaire dans la vibration des cordes, la voix, dans les mots, le son, les sonorités, l’inflexion, ne pas infléchir, une connotation impossible, la complainte, le refus, le refus de la complainte, ne pas geindre, la solitude, avancer, le silence extérieur, l’antre s’exprime, l’antre, une écharpe de laine imprégnée de son odeur, dans la crainte du noir ne pas allumer, dans l’affrontement des limites, surtout ne pas allumer, dans la respiration haletante, la peur dans la béance de ce qui nous attend, la béance, une bouche, malaxe, la chair et ses fibres, les êtres carnassiers, l’arrachement, des membres dispersés dans les cris de douleurs impossibles, vivre, vivre, vivre.

samedi 26 mai 2012

Je ne sais pas 30

30

Les bruits d’un couloir, les rainures d’un plancher, l’attente d’une réponse, lui, couché derrière la porte attendant l’ombre des pieds, le son des talons, la vie, les serrures, ce n’est pas encore, bientôt, peut-être, ne pas partir, se dire que certainement ça va venir mais en douter, douter de la parole, comme s’ils avaient dit et qu’ils n’allaient pas tenir, les promesses, les promesses, dans l’enfance il a attendu déjà, déjà il demandait que l’on tienne les promesses, la parole donnée, démissionnaires, absents, l’appel des registres, les quatre pieds d’une chaise, une chaise dans la promesse de son utilité, s’il lui manque un pied elle ne tient plus sa promesse, on la jette, ce qui est dit est dit, comment peut-il en être autrement, alors il n’y a plus rien, si ce que l’on dit n’est pas dit, il n’y a plus rien, du vent, un courant d’air sous la porte, on ne peut plus rien attendre, il ne faut rien attendre, mais parfois il est impossible de faire mieux que d’attendre, les réponses, une correspondance, il attend une correspondance, la porte, non. Dans la poussière du jour éclairée par la lumière du soleil, on ne s’imagine pas qu’il y ait autant de choses qui volent, il faut s’arrêter pour les voir, sans ça on passe à côté. Etendu sur le sol son corps, il ne se relèvera plus, il est mort d’avoir attendu une réponse à sa correspondance, des gens le pleurent, c’est triste ils disent, il attendait et personne n’est venu, même pas un courrier, il est mort étendu dans la poussière que soulève le jour, recroquevillé comme cherchant la chaleur, il est beau dans la lumière du soleil, le corps nu couvert d’un sous-vêtement blanc, les jambes ramenées à la poitrine, sur les lames, le temps, longtemps, il a résisté combien de temps à attendre, enfermé dans le bruit des portes et des serrures, seul dans la beauté, l’immobilisme de l’urgence, submergé par le doute de faire partie, dans la désintégration, l’inconnu dans le coin de la pièce, le silence règne, dérangeant plus que la mort, le silence qui permet de prendre conscience du bruit, l’omniprésence, une suspension, de l’ordre de l’impalpable, l’air, ce qui entoure et se meut dans le déplacement, le frottement des fibres des vêtements, la respiration, et malgré tout l’extérieur, les grues, les voitures, les marteau-piqueurs, les cris, la colère dans l’attente d’un signe, sortir, une délivrance, appartenir, appartenir. Dans le relâchement de son visage, sa libération, le sourire de ne plus attendre, il est plus qu’il n’a jamais été, dans la considération de son histoire, dans la confiance qu’il a porté aux autres, l’espoir que quelqu’un pousse la porte, la confiance, il est la correspondance, la réponse à la lettre dans l’insouciance du jugement, celui qui a cru, combien de temps, quelle souffrance dans la générosité de l’absence, un homme enfant dans la dépendance à l’acquiescement, attendant la permission d’exister, un être oublié derrière une porte ouverte qu’il suffisait de pousser, dans la sécheresse poussiéreuse il reste sa trace sur le plancher, un fœtus adulte, un homme pas né aux yeux des autres, seul, un cri muet, la croyance ultime en la promesse de ce que nous sommes les uns pour les autres. Il aura fallu qu’il meure, ou, qu’il ne vive plus pour enfin exister. Dans ces solitudes ordinaires certains continuent à marcher pendant que d’autres se couchent sur des planchers.

vendredi 25 mai 2012

Je ne sais pas 29

29

Le dos, dans la voûte, au bord de la falaise, le dos, dans le cri des oiseaux, l’horizon dans la fixité du corps, le vacillement dans l’opposition, le vent, la tôle rouillée, sourd d’une pulsation, incapable d’entendre le grincement, l’érosion lente, les mâchoires de l’étau qui serrent, le temps, l’écoulement des rigoles, le remplissage des bassines, les poignées d’agrippement, se tenir, tenir dans l’opposition, autant de marques, des stries, le départ, trop lourd, bien trop lourd. Les sentiers abruptes dans l’ascension, étroits, dans l’articulation des chevilles les hommes marchent au bord, dos à la terre, plus loin que la pointe, l’envergure, l’avancée, la progression, à la recherche de l’enfant, le premier cri, nu de ce qui encombre, les omoplates et la nuque, la nuque dans la coupure, les conversations abrégées dans la précocité de l’essoufflement, la peau coincée dans la fermeture éclair, la douleur, le mouvement des villes abandonnées, les pierres brisent les vitres dans l’arrachement des enseignes, un homme de dos au bord, un balcon sans garde-fous dans le déchaussement des pierres, le marbre, essouffler alors que rien n’a commencé, froid, froid, sur le plongeoir dans le bleu délavé du fond, les jambes ballantes, assis, là, dans l’intensité du dos, attendant l’impulsion d’un mouvement, le ressac, la déflagration, un constat d’inertie, le verdict du chemin parcouru, la chambre d’un hôtel résonnant, suranné, l’absence de la présence passée, ils se balancent les hommes pendules, dans le décompte de ce qui reste, l’inventaire des solitudes ordinaires, il n’y a plus mais il reste.

jeudi 24 mai 2012

Je ne sais pas 28


28

Une paire de ciseaux coupant la cellophane, des gouttes de sang, une ville magnifique dans le petit matin silencieux et brumeux, des œuvres d’art anonymes sans la lumière du jour, le bruit des talons, un rythme, une silhouette, un pont, un homme traversant, la nostalgie d’un endroit connu et quitté, un retour avec l’impression de ne pas être parti, une nostalgie inutile dans l’aiguisement des sensations, un rejet, les eaux du fleuve, des gouttes de larmes, un débordement intime, entre le sourire d’être vivant et la volonté d’être mort, le courage manque dans la sobriété rigoureuse, une ligne, un trait, des éraflures peut-être, un corps dans la limite de l’enveloppe, une image, ils se résument à peu de choses le temps, celui qui passe sans le mesurer, celui qui passe dans les paroles anodines, les paroles, ce qu’il y a au fond des nuits, l’insomnie sensitive, un  ressenti permanent, vibratile, attentif, les passages cloutés des grands boulevards, la vitesse, les rires, au milieu des autres malgré moi, une douleur nécessaire peut-être, une douleur dans la négligence de ce que nous sommes, se dire jusqu’au bout, se dire loin du récit, dans le rapprochement des peaux, dans l’odeur des aisselles, ce qui nous dégoûte nous rapproche de nous, le vinaigre. Il y en a qui partent et d’autres qui restent, dans la temporisation, il y en a qui veulent s’enfuir et d’autres qui veulent revenir, un balancier, le va et vient, il y en a que l’on aime et d’autres que l’on aime plus, pour toujours ou par caprices, il y a des paroles en l’air et des frappes aériennes, des avions qui emmènent et qui débarquent, il y a des petits bateaux, la coquille qui protège le fruit, les membres que l’on brise dans la soudure métallique d’un chantier naval, les vagues sur la coque, des croisières, le détestement du mot rêve, une moisissure sur la réalité de la débauche comme autant de paroles inutiles sur l’inconnue des jours qui suivent, les jours qui suivent, en être sans en faire partie, la culpabilité qui en découle, coupable de ne pas comprendre les enjeux, nu, ni mieux ni moins bien, nu dans la tentative de ne pas céder à la colère, se retenir pendant que les portes et les volets claquent aux vents que les hommes affrontent sans mesurer l’impact, l’enjeu, prêts à tout pour la condition d’un seul au détriment de combien d’autres, les autres, le cercle, loin de l’intime et son désordre. Un fil discontinu, une coulée dessinant un trait rouge sur un visage, la beauté de la blessure, l’œil rougi de la douleur, les frontières se dessinent dans la négation de la souffrance de l’individu, dans la torsion, la vrille. Il y a des regards insoutenables. Les enjeux. Il y a de la violence qui ne se marque pas sur les corps, des êtres abasourdis, dans la lobotomie hiérarchique, des immeubles à étages, des tours extravagantes, extravagantes, extravagantes et fixes au milieu des êtres qui marchent à leur pied dans le vertige des sommets inaccessibles, dans l’étrangeté quotidienne d’un soleil qui continue à nous éclairer, dans les parcs ombragés où les bacs à sable et les plaines de jeux résonnent de cris de joie, il y a des hommes qui pleurent les femmes qui bercent les enfants pour qu’ils s’endorment enfin, il y a ceux pour qui tout va bien et c’est tant mieux, heureusement qu’ils sont là, ceux-là, au milieu des oiseaux, loin des obstacles et dans l’émerveillement de ce qu’il y a, rien de plus. Et il y a moi, quel est mon enjeu à vous regarder si fort, peut-être trouver une réponse à ma dysfonction, plus égoïste encore, non, coupable de prendre et dans la tentative de rendre tant bien que mal dans ma réalité tronquée de la vôtre, insuffisant d’envergure peut-être pour ambitionner autre chose qu’ajouter du temps à du temps, l’enjeu où se trouve-t-il. Dans l’excuse du regard que je porte, l’écriture comme un filtre d’amour au milieu des colères, la seule manière de vous dire absolument sans que l’image implique quoi que ce soit, je ne suis personne excepté celui qui tente de vous dire, un personnage pour certains, une personne pour d’autres, est-il possible de faire la part des enjeux dans l’inconscience de qui nous sommes réellement. La beauté n’apparaît qu’au milieu de la laideur, dans le commun du quotidien, il suffit de la prendre, elle s’approprie sans difficultés puisque ce que vous regardez reste inconscient de sa beauté, dès qu’il y a conscience, elle disparaît dans le passé ou le futur mais elle n’est plus présente, l’évanouissement, l’évaluation personnelle de la quantité d’espoir qu’il me reste par l’émerveillement du temps qui se suspend, sa fréquence et son absence de valeur, le voilà l’enjeu, l’émerveillement sans la valeur de ce que je regarde, dans la fidélité du chien à son maître, je serai toujours derrière la porte, toujours.

mercredi 23 mai 2012

Je ne sais pas 27

27

Un cri dans la douceur d’un regard, la peinture explose dans la projection, une colère inexplicable, un enfermement presque, un enfermement. Une plage dans le bruit des vagues, l’inquiétude des enfants d’être abandonné dans une voiture, rouge, un ballon dans une rue en pente, des rebonds, des ronds dans l’eau, des rubans, des liens, ils s’attachent à des images, laissant glisser les mains sur le visage d’une photographie, une porcelaine translucide, un vieux rose, la nacre, la mémoire, là, dans la tristesse d’un lendemain inconscient de celui qui a précédé, au milieu de tous ceux qui pensent ne mourir jamais, être là et attendre, attendre un sursaut d’humanité, se dire que peut-être, nous nous sommes trompés, perdus, abandonnés, oubliés, négligés, largués, désistés, désertés, renoncés, dans le remplissage des interstices sans le vide nécessaire, la plage. L’urgence, l’industrie du progrès, aux dépens de tout le reste, dans le miroitement de lendemains meilleurs, éblouis des promesses, les ballons dégringoleront toujours les rues en pente pour le plus grand bonheur de ceux qui les regardent passer, l’enfant sur le rebord de la fenêtre, un cœur dans la buée du carreau, dans le temps qui passe, une parole rendue, le langage, le langage hors des remplissages, dans l’expression de la beauté, l’espoir de pouvoir se dire encore tout l’amour nécessaire, le minimum peut-être, passer la main sur ton visage.

mardi 22 mai 2012

Je ne sais pas 26

26

Dans l’agitement autour, au bord des fleuves qui traversent les villes, comme des ventres engloutissent, dans la vitesse du courant caressant les berges où attendent des bancs gravés des prénoms des enfants qui s’embrassent, grandir dans la mélancolie des flots, se laisser aller à la musique des profondeurs sombres, opaques, dans la lassitude du temps rythmée par les trains remplis de passagers en mouvement, à contre-courant, dans le délaissement des arbres qui s’effondrent, des branches qui baignent les bourgeons d’un printemps, dans l’attente il reste les saisons, des marquantes, nous perdons du terrain, je voudrais revenir là le dernier jour, le dernier jour. Donne de la voix, entendre, crie, vivre, dans la bousculade des émotions, dans les larmes, je verse sans m’en plaindre, je ne veux pas être aride, il me reste, il me reste de la jeunesse, du bois vert, aime dans ce temps qu’il te reste, dans le remugle des fonds vaseux, dans les roseaux des eaux tranquilles, sur les embarcadères des bateaux de plaisance, dans la traversée, une brasse coulée, dans ces corps jeunes, sur les bancs impudiques, quelques lettres et un cœur, à jamais, à jamais. Je veux me souvenir que tout est possible, de ce moment où nous ne savions pas en croyant qu’un jour nous saurions, jamais, je veux courir dans les flaques laissées par la pluie, chuter le genou écorché, ne pas avoir peur du rouge qui coule de mon corps, le sang d’une jeunesse, dans la décrue, vers l’embouchure, il n’est pas trop tard, jamais, je veux vivre, brûler encore, me réjouir des humeurs fluctuantes, des paradoxes, l’enfance de l’art, les colères, toute l’injustice de dire ce que je ne pense pas, demander pardon, pardon. Je me souviens de vous, de tout ça que nous n’étions pas, il y a des vies qui se jouent sans savoir, nous aurions pu mourir, nous sommes vivants, loin les uns des autres, sans comprendre, il reste le fleuve et ses virages, toute cette sauvagerie du trop plein, la fougue, les lieux-dits se rappellent à la mémoire liée au fleuve, les écluses comme autant d’étapes, les rives comme une escorte, le halage sur lequel nous regardions passer les bateaux, les péniches, un ancrage, une amarre. Je suis venu m’asseoir.

lundi 21 mai 2012

Je ne sais pas 25


25

Des chemins, des lignes droites dans l’entremêlement des carrefours, en être là, dans l’avalement, la déglutition, dans la limite du sens des mots, au milieu des sentiments abstraits, ne plus rien savoir, s’enfermer pour ne plus entendre et voir, l’érosion, l’usure d’un homme à la porte des mélancolies, dans la volonté de s’asseoir et de continuer à parler envers et contre lui, il regarde ses mains de chair, vulnérable, emprunt de sentiments inextricables, dans le doute de ce que nous sommes les uns pour les autres.

dimanche 20 mai 2012

Je ne sais pas 24


24

Deux murs qui se rejoignent forment un angle, une arête. Des jours de larmes, la sécheresse d’un morceau de pain, abrasif, un goût amer, l’agrume. Seul, des gens s’asseyent, seul dans le mouvement de ce qui se déchaîne, dans le grondement du chien endormi, dans le brûlant des gorges il y a la bile. Une pierre jetée dans la vitre, de l’intérieur, pour s’enfuir des portes. Il n’y a plus rien, excepté ce que d’autres prennent, que des yeux, des yeux. Les enfants dans la dégoulinance des eaux usées, l’industrie des corps sans âmes, debout, dans la défiance des jours qui se suivent, la projection contre les murs dans le démembrement des corps criant à gorges déployées je suis un être humain, une pliure dans l’indicible craquement de la matière, abasourdi comme la lumière ne trouvant plus le jour, ils déambulent, un défilé  de corps décharnés dans les alarmes des volets métalliques peut-être. Les oiseaux sur les branches, dans l’odeur des sentiers humides décomposant lentement les feuilles mortes, la boue, dans la saturation, un débordement.

Je ne sais pas 23


23

Une explosion, un homme attaché, des piquets, la voix se pose, il chante, il chante dans la fixité de l’emprisonnement à la tâche et aux charges, l’explosive. Il en faut du temps. Ils s’écoulent sur les plages aux ventres ronds des enfants de famine, les larmes des coupables, l’injustice peut-être, les oiseaux continuent à affronter les éléments, le lot quotidien, les mains se desserrent laissant la dérive dans l’inconnue des océans, Ils vomissent des poissons de surface, des mers d’huile dans l’abstraction des responsables, dans un chavirement au son de la musique des plaintes, un tango, rouge flamboyant, le sourire d’une photographie dans l’urgence du moment, une plage, le dénouement. Une femme regarde un homme en pensant à l’enfant. L’orchestre joue dans le fond du bar, le souvenir enjolivé, la mélancolie, prends-moi dans tes bras dans l’urgence des pas qui s’éloignent déjà, nous pourrions mourir, un jour il faudra. Certaines femmes aiment qu’on les regarde, et des hommes obtempèrent dans un accord tacite de ne toucher à rien, une image, un roulement de tambour, la suspension, l’instant d’un regard sans l’empreinte de la main, une trêve dans l’inacceptable vitesse quotidienne des délaissements. Le chien se couche derrière la porte. Un sourire, un jour comme de l’ouate dans du mercurochrome.

samedi 19 mai 2012

Je ne sais pas 22


22

Au petit du jour qui vient, suivant de celui qui précède, des événements dans les fils d’attente, quel chamboulement, à quoi doit-on s’attendre dans le possible de tout, le meilleur peut-être, c’est aujourd’hui que des millions vont naître, remplaçant dans la joie ceux-là qui attendent de partir, combien naissent pour un qui part ou inversement tout dépend ce que l’on attend. La vie, d’accord ou pas d’accord, un matin comme tant d’autres avant, le chien déjà présent, fidèle, une ombre presque, la caresse comme machinale, jusque-là rien de bien extravagant à cette journée qui se met en branle, au milieu des incendies, des feux de forêts d’hommes et de femmes, un quotidien confortable en somme, confortable. La fidélité comme une récurrence, non, comme la volonté consciente de ne pas s’attacher, se libérer des mensonges, factice, contrefaçon, des mots, des mots pour dire le refus de s’aliéner les uns aux autres dans des promesses vaines, si tu dis tu fais, déjà quelque chose change. Il n’y a toujours pas de lumière, quelqu’un dort dans la pièce adjacente et inaccessible, des êtres humains empilés sans se connaître, dans des tours déchirantes, les maisons d’hier divisés en appartements d’aujourd’hui, toujours plus petit, dans le craquement des flammes comme des corps qui s’entrechoquent de tout ce qui les sépare dans une superficie restreinte, derrière les murs des drames et des bonheurs, un jour comme un autre, l’addition qui fait la somme, l’instinct quotidien que le temps s’écoule au milieu des sentiments, des mots, le silence avant l’urbanité des croisements. Peindre le dimanche.

vendredi 18 mai 2012

Je ne sais pas 21


21

La solitude nécessaire à voir, la solitude comme la possibilité des autres alentours, la solitude afin d’accepter l’interférence, la solitude pour mieux se retrouver, partir, courir comme l’enfant, léger de vous, apprendre à nouveau sourd de tout ça, léger de la carcasse et des encombrements, de ce qui jonche les routes comme autant d’obstacles pour se rejoindre, le temps, le compte ou le décompte, ce qu’il nous reste, le reste comme la monnaie de ce que nous avons eu. Le miroir reflète les portes qui claquent. Le souvenir des fauteuils, de vous et de moi, nous entourant dans la chaleur d’une pièce, dans l’absence comme une éviction volontaire, s’extraire de ce qui entoure pour être au plus près de ce que nous pensons être, assis dans du velours, les images défilent dans l’impalpable sérénité des émissions de chansons, tout sourire, je ne sais pas, je ne peux pas. L’intimité offre l’inconfort des variations, la surprise des absences, intimes, les excuses sans explications, se permettre, non, l’incapacité, refuser les excuses, l’addition, des calculs, incapable, la rigidité d’une camisole, impossible d’éviter les coups, le butoir, les corps. L’impression d’avoir tout donné alors qu’il en reste encore, pourquoi se satisfaire, plus loin toujours plus loin, la difficulté de l’exigence, une douleur presque, l’humanité dans l’odeur des marées abondantes. Nous nous appartenons à jamais, indélébile des embrassements, des étreintes, même dans l’éloignement, dans l’absence il reste les calculs, cette volonté d’être aimé, aimés. Ne pas s’habituer, refuser la compassion d’un regard qui dit vous comprendre, noyé dans une piscine, un corps flou sur le bleu du carrelage, dans le brou des feuilles macérées, l’hiver, l’hiver devant le feu d’une cheminée sans savoir ce qui nous y rassemble, l’intérieur amniotique comme une évidence, une évidence, aveugle dès la naissance.

jeudi 17 mai 2012

Je ne sais pas 20


20

Est-il possible. Est-il possible de se tenir au bord de la falaise le regard haut, le front volontaire, libéré de la charge de ce qui précède à notre insu, souvent rongé par cette peur de savoir et de s’être trompé, ce que nous savons au plus profond bien avant l’obstacle, les remords de n’être pas ce que vous attendiez, vouloir tellement vous contenter, tellement à s’en oublier, s’en oublier, ne sachant plus où regarder, ne sachant plus entendre sa respiration même, se répéter comme pour se convaincre, sans cesse, la folie douce que de remplir une fonction plutôt qu’une autre, se poser des questions, des questions à la suite des autres, un mouvement perpétuel. Comment faire pour avancer libre au milieu des contraintes, libérer les mains pour enfin les embrasser, les glisser sur les visages, se laisser caresser sans en attendre plus des autres, les caresses dans la bagarre quotidienne, la bagarre pour émerger où d’autres submergent, l’ambition peut-être, inutile ou irraisonnée, la déraison de croire en cela que nous sommes, une entité singulière dans une masse globale. Etre au pied de cette falaise et regarder l’éperon rocheux avec envie, comme si cette place était la nôtre, l’accession, mais il faudra grimper, apprendre, il faudra du temps, du temps, toujours le temps, est-ce le perdre que de vouloir accéder à ce que nous ressentons comme dû, coupable d’avouer les ambitions, les ambitions, le travail intimement lié, la chute, comme pas prêt encore, pas prêt, ou insuffisant, insuffisant, quel mot. Un rappel, qualificatif du paradoxe entre le potentiel et le travail réel, dépasser ce point de maîtrise pour enfin se mettre à transpirer, le porte-à-faux, l’inconfort, la délicatesse, le risque certainement, la fainéantise, le visage se tourne en écrivant ce mot, honteux de savoir qu’il est approprié peut-être, un regret de n’avoir pas, dans la maladresse de ne savoir pas, trop tard peut-être pour trouver la voie, tous ces doutes me tuent et détruisent le travail accompli comme une mémoire défaillante ne se souvenant de rien, un effacement. Un effacement malgré la conscience de ce souhait de vous rejoindre la haut, sur le pic et de regarder loin, l’horizon, l’horizon et ne rien sentir vous arrêter, exulter dans la fougue d’un homme en liberté, la liberté dans une cour grillagée, très jeune déjà le long du cours d’eau je voulais m’échapper, partir où vous ne me retrouveriez pas, vous faire souffrir de la même souffrance ressentie de n’être que là où je me trouvais, je rêvais de tellement plus que cette respectabilité de pacotille qui reconnaît le courage des hommes, j’aurais voulu que vous ayez peur de moi, que vous craigniez mon départ, que vous ayez peur de me perdre, alors que je ressentais que mon absence n’aurait rien changé, me demandant sans cesse pourquoi rester, sans le retentissement espéré, celui de la naissance peut-être. Intime présomption d’y être malgré eux, une présence inopportune, le démenti de la vie pour la vie, comme si la mort faisait partie de moi dès le premier jour, comme si le rêve n’était pas moi, un ailleurs au milieu de ce que je représentais, un empêcheur, dans les pieds, alors souvent je me suis vu sur cette colline revenir en vainqueur et terrorisé cette région qui n’avait pas su reconnaître en moi l’avenir, c’est terrible, ceci justifierait l’erreur de mon parcours, tout ce chemin pour en revenir là, au point de départ mais pire, un constat d’impuissance, l’échec, je voulais être chef et je ne suis même pas soldat, est-il possible de continuer. Une entité, seul, inconscient de l’amour à l’entour, cruel pour ceux-là, le voilà mon éperon rocheux, l’amour dont je prive ceux qui me l’offrent, l’injustice quotidienne de la frustration d’un homme seul, tout ça comme un aveu vulgaire, il ne manquerait plus que je me mette à pleurer. C’est le moment de reprendre la route, il faut que je travaille car il me reste la dignité de n’être que celui-là que je suis, dans la posture douloureuse d’un corps figé dans la lave. Et au milieu de tout ça il y a la beauté du jour, le cri.