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Les cercles annuels d’un tronc, le vieillissement,
l’avancée dans le temps, le souvenir de ce qui passe, le nœud de la branche
arrachée, dans l’impalpable de la neige comme du sucre sur les cheveux. Les
gens, ceux du matin, les histoires, il y a des histoires, des belles et des
moins belles, aussi de très laides, des atroces, il y a des voix qui parlent.
Le point de départ, doit on tout savoir, se nettoyer de ce que nous savons,
refuser d’être le filtre de la voix des autres, chercher la sienne, propre de
tout ça, trouver le sens. Les fausses fourrures habillent les femmes comme de
faux animaux, les guitares sont électriques parfois, les journaux noircissent
les doigts, les doigts d’une main faite pour la caresse sur les visages, les
ongles noircis des enfants qui jouent dans la terre. Les efforts nécessaires
pour trouver la poésie dans l’image d’un jour sombre, le recueil comme un
carnet du fond de la poche, le crayonnement des sentiments quotidiens, capter
le ressenti, ne pas le laisser s’échapper, une trace comme un cercle. Les
hommes regardent les femmes sans les affronter, déjà ils biaisent, dans
l’intensité d’une courbe qui se moule dans des justes aux corps impossibles à
soutenir, les artifices et la mèche, les cheveux et la coloration, être
regardé, le spectacle des défilés des visages que nous oublierons, l’intensité,
l’insoutenable de ce que nous ne serons jamais, la beauté d’un corps nu offrant
l’espoir de la vie dans un envol lyrique, le réceptacle de nos orages. Des
couleurs dans une image, le rouge souvent, comme des petits chaperons, le rouge
dans la grisaille climatique, l’œil en éveil dans l’endormissement des saisons,
un halo flou, une sensation de vie, la couture sur les trottoirs des villes.
Les flaques au pied des bancs publics, les gravures, le passage de celui-là qui
voulait dire sans savoir ou et comment, un prénom abîmé sur une planche comme
une épave sur une plage, l’abandon du temps, l’usure, la lame se brise dans le
bois dur ou dans l’écume. Les poissons volants discutent avec les oiseaux
nageurs. Dans impossible il y a possible, la pugnacité, possible absolument, le
ressac, y revenir jusqu’à l’envol, l’éloignement vers d’autres horizons, la liberté
de croire, le possible à contrario, l’amour envers et contre, le mouvement dans
le refus de l’immobilisme, le progrès antidote de la colère, il nous
appartient, responsables pour ne pas être coupable, le carnet des crayonnés,
les visages dessinés dans la recherche illusoire du trait, de celui que je
voulais dessiner, pas le modèle il ne m’intéresse pas, je cherche une vérité,
une seule, celle de ses yeux, dans la giclure inesthétique, sans la gomme,
chaque trait faisant partie des rides du temps, l’ondulation provoquée par le
geste brusque, imprimée. Il y a des roulettes qui portent le poids de ce qui ne
veut plus marcher, des caddies tirés par des mains serrant une poignée, il faut
se tenir dans l’avancement, sans la rue tout ceci n’existerait pas, sans les
cents pas, la promenade comme une ligne de conduite, la recherche du filon à
exploiter dans les croisements des solitudes élémentaires qui nous poussent à
regarder le sol par peur de devoir se voir, les hommes regardent les femmes de
travers pendant qu’elles s’enfuient apeurées, reviens, je voudrais te dire
comme tu es belle rien de plus, que l’on s’y prend mal, les vulgarités de la
marche quotidienne, le rouleau compresseur des lieux communs dans la
singularité de chacun, l’incompréhension du jeu qui s’installe à l’insu,
l’éclipse. Je ne sais plus ce que je dis, mais je suis là, dans
l’émerveillement de ce que nous sommes et que nous laissons transparaître, ce
que nous ne savons pas et que d’autres regardent, spectateurs de nous dans
l’intensité de la non représentation, la présence malgré nous, des images
fortes, l’eau des rivières sous le soleil d’été, la sensation froide sur des
chevilles abîmées de porter celui-là qui se repose sans s’arrêter, le mouvement
dans la statique du corps, les images assemblées, j’accepte les marques du
temps qui me vieillit, j’appréhende ce visage avec des yeux d’enfant, des
traits supplémentaires dans le carnet aux images, des milliers de dessins dans
les jours grisonnants, l’obsession quotidienne de trouver ce que je ne cherche
pas, curieux, naïf de ce que je veux garder en mouvement, les oiseaux.
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