jeudi 14 mars 2013

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Il y a une chaise, une table rase et les yeux de ma mère, du piano un peu lointain, il y a la vie et la mort, les peurs, je suis un enfant, dans la colère capricieuse, dans le dégoût face à l'injustice, dans la solitude, dans le coin de la pièce, il y a tout l'amour et sa maladresse, les incompréhensions, tous ces rêves déchus de part et d'autre, il y a tout ça qui jonche le plancher, il n'y a plus de paroles, du silence bercé par ce piano, il y a aussi des larmes étouffées, des joues roses, il y a aussi les odeurs d'une cuisine quotidienne, il y a les tartines, et le silence qui entoure tout ce qui reste autour, le mobilier vieilli et dont je n'ai que faire, il y a les souvenirs imprécis et flous, il y a toute cette colère, le vide, il y a ce fleuve qui coule dans mes veines, tout ce passé d'un enfant que j'étais, cette route traversée si souvent, la porte et la sonnette muette parce qu'il n'y a plus personne, tout le monde est parti de cette maison, je ne reviendrai plus, c'est fini, rien ne m'est nécessaire ici, il manque le principal, il reste quelques douleurs et la vie passée, des sourires aussi, le ventre me serre, je voulais être désinvolte, me voilà triste et grave au milieu de la porcelaine des assiettes vides, je pars pour ne plus revenir, il n'y a plus personne, il n'y a plus personne excepté l'écho des voix, des images mal définies, l'imperfection de la mémoire et les enfants qui jouaient sur le halage.

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